La prostitution au Canada: un enjeu de traite humaine

23 janvier 2014
Légalisation de la prostitution au Canada 
 
Au cours des dernières années, la Cour supérieure et la Cour d'appel de l'Ontario ont déclaré inconstitutionnels certains articles du Code criminel, qui prohibent la prostitution dans les maisons closes et la sollicitation dans la rue. Ces deux tribunaux avaient également déclaré inconstitutionnels les articles qui criminalisent le fait de vivre en partie ou entièrement des fruits de la prostitution.
 
Le 20 décembre 2013, la Cour suprême du Canada a invalidé les dispositions du Code criminel qui encadrent la prostitution. Elle suspend cependant l'application de sa décision pour un an, afin de permettre à Ottawa de réviser le Code criminel s'il le juge nécessaire.
Dans un jugement unanime, le plus haut tribunal du pays estime que ces trois mesures sont inconstitutionnelles, car elles vont à l'encontre de l'article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, qui garantit le « droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne ».
 
La Cour estime que les trois règles sont soit « totalement disproportionnées » par rapport au risque ou qu'elles ont une « portée excessive ».
Elle soutient que « les interdictions augmentent les risques auxquels s'exposent les prostituées lorsqu'elles se livrent à une activité qui est en soi légale ». On peut aussi lire dans le jugement que les lois actuelles « empêchent des personnes qui se livrent à une activité risquée de prendre des mesures pour assurer leur propre protection ».

En vertu du Code criminel, il est illégal :
 
  • d'exploiter ou d'utiliser une maison de débauche, qui peut être le domicile d'une prostituée, un hôtel, mais, aussi, un espace de stationnement; (art. 210)
 
  • de vivre des fruits de la prostitution, notamment de faire du proxénétisme; (art. 212)
 
  • de faire de la sollicitation dans un lieu public ou à la vue du public (art. 213).

     
Les enjeux de la légalisation
 
Les membres du CATHII déplorent que ce jugement légalise l’exploitation sexuelle sans tenir compte du contexte social, économique et des inégalités entre les femmes et les hommes qui persistent encore aujourd’hui.
 
Le CATHII considère la prostitution comme une violence et une forme d’exploitation dont les femmes sont les principales victimes. Plus encore, il considère que la demande est la principale cause de la traite de personnes, que ce soit par la demande pour des actes sexuels ou pour des offres de travail précaire.
 
Pour mettre fin à cette violence et aider les femmes à se sortir de la prostitution, il faut aussi, fournir aux femmes prostituées des services adaptés à leurs besoins, particulièrement dans les domaines de la santé, de l'éducation, du logement et de l'emploi.

Parmi les pistes de solution pour contrer la traite à des fins d’exploitation sexuelle, l’approche suédoise est souvent présentée comme un modèle à suivre, car elle s’attaque à la demande en pénalisant l’achat de services sexuels. La pénalisation des « clients » est accompagnée des mesures suivantes :
 
  • Une campagne publique pour contrer la banalisation de la prostitution;
 
  • Des programmes de sensibilisation visant les jeunes et les personnes généralement ciblées par les criminels;
 
  • De programmes qui viennent en aide aux femmes qui désirent sortir de la prostitution.
 
Une partie des mesures devrait aider les femmes à sortir de situations violentes, notamment la prostitution et à fournir à celles-ci l’accès à différents services : refuges, conseils juridiques et sociaux, éducation et formation professionnelle recherche d'emploi.
 
À lire pour en savoir plus :
 
 
Sur le modèle nordique voir l’article de Traite et industrie du sexe de Janice Raymond du CATW.