Travail forcé : la face cachée de la traite humaine

28 octobre 2013

Lors de l’assemblée générale annuelle du CATHII, Louise Dionne et Jill Hanley* ont donné une présentation intitulée: « Le travail forcé, la face cachée de la traite humaine ». Une attention particulière a été portée à cette forme de traite, notamment en lien avec la migration.

Une hausse inquiétante

Plusieurs données ont été présentées, notamment le fait que près d’un cinquième des personnes  migrant pour le travail dans le monde sont victimes de travail forcé et qu’on retrouve 1,5 million de victimes de cette forme d’exploitation en Occident. Selon l’Organisation internationale du travail (OIT), le nombre de victimes de travail forcé est passé de 12,3 millions en 2005 à 20,9 millions en 2012.

Politiques d’immigration

En outre, les politiques d’immigration de plus en plus sélectives dans les pays industrialisés augmentent le risque d’exploitation des travailleurs migrants. À titre d’exemple, les programmes de travailleurs étrangers canadiens encouragent le recours à une main-d’œuvre immigrante que ce soit dans le domaine de l’agriculture, des services comme la restauration, de la construction ou du travail domestique. Les femmes sont surreprésentées dans ces emplois précaires.

Ces programmes sont en expansion depuis quelques années, de sorte que les travailleurs migrants temporaires occupent le tiers des nouveaux emplois au Canada. De plus, la précarité de leur statut d’immigration et la dépendance à leur employeur, leur font craindre les conséquences s’ils dénoncent les situations d’exploitation. De plus, il y a peu d’inspection des conditions de travail auxquelles ils sont soumis.

Recommandations

Bien que le Canada ait entrepris des actions pour lutter contre la traite des personnes qui incluent le travail forcé, les besoins et la protection des victimes ne sont que très partiellement pris en compte. Par exemple, le permis de séjour temporaire (PST) offert aux victimes de traite n’assure qu’un statut temporaire. L’approche privilégie la lutte à la criminalité plutôt que s’attaquer aux enjeux de droits humains.

Plusieurs recommandations ont été proposées par des organisations telles que le Centre des travailleurs et travailleuses immigrants (CTI) pour venir en aide aux victimes de travail forcé et prévenir les situations d’exploitation. Le CTI recommande  une réforme des programmes de travailleurs étrangers temporaires, notamment l’abolition du lien de dépendance à l’employeur, l’inclusion de l’ensemble de ces travailleurs et travailleuses aux mesures de protection des droits du travail peu importe le statut. De plus, des inspections devraient être mises en place sur les lieux de travail, sans attendre les plaintes de travailleurs.

Cela dit, il est essentiel d’aller au-delà des programmes de travail temporaire pour agir plus largement sur le système d’immigration en l’étendant aux travailleurs dans les secteurs peu qualifiés, reconnaissant la contribution de ces derniers à la société canadienne. Finalement, sensibiliser la population et les dirigeants au phénomène des réfugiés économiques et s’attaquer aux facteurs structurels qui le sous-tendent sont des pas nécessaires pour le respect des droits de l’ensemble des travailleurs.

Collaboration Sandrine Sarradet